Mondes Emergents

Another BRICS in the world...

vendredi 27 mai 2011

La Chine bientôt en pénurie de charbon ?



Les Etats-Unis ont connu le pic du pétrole 30 ans avant tout le monde. La Chine imitera bientôt les Etats-Unis dans le charbon...

Alors que la consommation ne cesse d'augmenter dans l'Empire du milieu, le gouvernement commence à s'inquiéter de l'état de ses ressources. L'Etat a même été forcé de rationaliser la consommation.
L'image de "grenier à charbon" de la Chine pourrait bientôt disparaître.


Positif pour l'environnement ? Oui.
Positif pour le gouvernement ? Non.


Car la Chine aura besoin encore longtemps du charbon. Et avec l'épuisement de ses ressources, la Chine devient de plus en plus dépendante des importations. Or les prix internationaux du charbon explosent depuis un an.


L'appétit dévorant de la Chine fera des heureux : les producteurs de charbon qui sauront profiter de l'envolée des prix.

Les "cygnes noirs" font décoller le minerai
Les prix internationaux du charbon ont touché les 124 $ début mai.
Cette hausse a notamment été alimentée par deux événements inattendus (cygnes noirs):

  • le tsunami et la catastrophe nucléaire japonaise. La reconstruction nécessitera un surcroît d'importations de charbon.
  • les inondations. Les mines de charbon australiennes, sud-africaines et colombiennes ont été partiellement inondées. 15% de la production australienne serait perdue. L'offre est à la peine.

Mais surtout, c'est bien une tendance plus lourde qui porte le marché depuis un an : la consommation chinoise !


Le plus grand consommateur de charbon au monde
La Chine est à la fois le plus gros consommateur et le plus gros producteur de charbon au monde.

Qui plus est, le pays est assis sur les troisièmes réserves mondiales, derrière celles de la Russie et des Etats-Unis. En revanche, sa place sur le marché international du charbon était jusque-là relativement réduite, le pays étant auto suffisant en charbon jusqu'à très récemment.

Ces atouts lui ont tout de même permis de faire passer sa production de 646 millions de tonnes équivalents pétrole en 1999, à 1.552 milliards en 2009. Malgré ses efforts côté production, cela n'a pas suffi. Sa consommation exponentielle a changé la donne.

La production n'arrive plus à suivre
Rien que pour le premier trimestre 2011, la consommation d'électricité a augmenté de 12%. La rapidité de l'électrification du pays a laissé la production à la traîne.

Les producteurs chinois comme Shenhua Energy et Yanzhou Coal Mining ont longtemps permis de maintenir la production à des rythmes très élevés. La production a encore augmenté de 15% en 2010.

Mais ce rythme est désormais bien en dessous du niveau de la consommation. Les importations ont ainsi dû augmenter de 42% la même année.

Aujourd'hui, la Chine arrive à gérer la pénurie, forçant des industries énergivores à fermer ponctuellement (c'est le cas des hauts-fourneaux aluminium par exemple).

Les émergents font la fortune des charbonniers
La Chine n'est pas la seule à compter majoritairement sur le charbon qui fait 80% de son électricité.
L'Inde utilise énormément le charbon pour produire son électricité. Les rythmes de consommation ont ainsi été similaires. La consommation indienne a augmenté de 50% sur les
sept dernières années.


Une coûteuse rationalisation
A la consommation chinoise effrénée s'ajoute un autre phénomène qui pousse les cours à la hausse : la rationalisation de l'industrie charbonnière chinoise.

L'Etat communiste est de plus en plus concerné par les risques environnementaux liés au charbon. Le gouvernement a ainsi ordonné la fermeture des petites mines jugées illégales ou trop dangereuses.

La décision a été catastrophique pour les régions fortement accros au charbon. Pour la seule région du Shanxi, la production a baissé de 10% fin 2009 du fait de l'arrêt brutal des centrales. Cette région a dû augmenter de 171% ses importations pour faire face à l'arrêt brutal de sa production.

Cette rationalisation pourrait laisser le pays dans une situation d'importation jusqu'en 2015.

Le contrat sur le charbon décolle
La hausse de la consommation et la baisse de la production ont conduit tout naturellement à une explosion des prix.

Les contrats passés entre les producteurs et Pékin ont atteint des chiffres jamais vus. Pour 2011-2012, la géant minier Xstrata a conclu un contrat avec le Japon à 130 $ la tonne. C'est une augmentation de 32,6% en à peine un an.

L'Australie et l'Indonésie sortent gagnants
Les principaux producteurs de charbon asiatiques sont évidemment les grands bénéficiaires de l'appétit chinois et indien.

Selon l'Energy Information Administration, les exportations australiennes en direction de l'Asie devraient augmenter de 64% d'ici 2035. Sur la même période, les exportations de l'Indonésie devrait augmenter de 26%.


Cet article a été publié sur www.edito-matieres-premieres.fr

samedi 14 mai 2011

La Chine, art, spéculation et poissons monochromes

Il semble bien loin le temps où Simon Leys décrivait l'asphyxie culturelle de la Chine. Jiang Qing aux commandes, les bibliothèques regorgeaient alors des œuvres de Mao et les opéras étaient au nombre de 4. L'art avait alors été vidé, asséché, dévitalisé par la veuve Mao qui pourtant aurait excellé dans le rôle de la mère Thenardier.

En mars dernier, Pékin vient de mettre une corde de plus à son arc : l'art. Ou plutôt le marché de l'art. La Chine est devenue le deuxième marché de l'art dans le monde devant l'Angleterre, pourtant mère patrie de Christie's.


Quand Baishi Qi passe devant Andy Wharol

La Chine était déjà très présente sur le marché de l'art.

Parmi les 10 artistes les plus cotés au monde, 4 sont chinois. Picasso est suivi de Baishi Qi (photo), puis de Wharol, pour retrouver ensuite Daqian Zhang et Beihong Xu et Baoshi Fu. Et parmi les artistes contemporains, les chinois s'imposent également. Dans le top 10, après Basquiat, Koons et Prince, suivent 6 artistes chinois.

La Chine possède également des maisons de ventes. Derrière Sotheby's et Christie's pointe 7 maisons chinoises, comme Poly International ou China Guardian.

Je ne crois pas aux coïncidence, comme à l'émergence d'une génération spontanée de talent. J'ai plus tendance à croire aux coups de projecteurs et aux investissements spéculatifs. Dans ce secteur, la Chine s'en sort pas trop mal...


La subversion commerciale

On ne peut pas dissocier la montée en puissance de la Chine actuellement et le boom de son marché de l'art. Oui, j'enfonce les portes ouvertes. Les quelques lignes qui suivent s'adresseront donc à toi, lecteur naïf qui pense encore que Ben est original et Bernard Buffet a du talent.

Je me souviens d'un numéro de la série Strip Tease, de France 3, qui avait été consacré entièrement au collectionneur d'art Pierre Hubert. L'émission le suivait notamment en Chine faire le tour de plusieurs ateliers. La façon d'acheter les toiles m'avait sensiblement rappelé le choix attentif que je porte tous les samedi matin à acheter mes tranches de jambon. La comparaison vaut aussi lorsque je dois investir une forte somme dans une nouvelle paire de chaussettes.

Le collectionneur sillonnait au pas de charge les ateliers et achetait en vrac. Mais le plus intéressant était la qualité des toiles. Acidulées, faussement politiquement incorrect. On aurait pu les rapprocher de Lichtenstein si ces artistes avaient eu à leur disposition plus d'un stabilo jaune, et avaient eu du talent.

Mais le collectionneur avait repéré le trio gagnant :

    Sujets politiques + Couleurs fluos + Émergence de la Chine


Les fonds d'investissement, ou le goût de l'art

Cet exemple illustre une tendance, le marché de l'art chinois est devenu un eldorado pour les fonds d'investissement en quête de placements. L'art, c'est un peu comme les métaux précieux ou les sacs Hermès, leur marché est souvent épargné par les krachs boursiers.

Ce mouvement spéculatif a été illustré avec le succès foudroyant de Zhang Xiaogang (photo). Début Avril, cet artiste réalisait un record pour une œuvre contemporaine chinoise, avec la vente d'un triptyque pour 7.1 millions d'euros. L'artiste avait déjà flambé dans les années 2000, où une œuvre vendue à 40 000 euros en 2003 avait atteint 2.3 millions en 2006.

Le succès de la collection Ullens, décrite par les Echos du 15 avril, avait également été expliquée par l'arrivée d'un fonds d'investissement américain.


Les émergents déplacent le centre de gravité de l'art

Vous l'avez remarqué, la Chine n'est pas le seul pays émergents. Le Moyen Orient ou l'Inde décollent aussi depuis 10 ans. Et leur marché de l'art également....quand je vous dis que les coïncidences n'existent pas.

Sotheby's a annoncé récemment que le marché du Moyen Orient connaissait le plus fort taux de croissance dans le monde. De même, L'Inde commence à remuer, portée par le portefeuille sans fonds des grandes familles indiennes comme les Mittal ou les Ambani.

La conclusion apparaît bien simple. En art comme en immobilier, l'argent va là ou le marché est porteur. Peu importe que les artistes locaux se rapprochent plus de Combas que de Picasso....