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jeudi 18 mars 2010

La France regarde enfin vers l’Est

La France, à travers les célébrations de l’année de la Russie en 2010, essaie de rattraper son retard sur ses partenaires européens. Sur les ruines d’une hypothétique politique énergétique européenne, plusieurs pays européens avaient commencé à mener des politiques énergétiques unilatérales.

Longtemps demeurée à l’écart de ce mouvement, la France s’emploie désormais à concurrencer ces pays sur le thème du partenariat stratégique avec le grand voisin de l’est. La percée des fleurons énergétiques français, au premier rang desquels GDF Suez, Total et EDF, a ouvert la voie à ce rapprochement. Désormais, la tache de M Sarkozy est de gommer l’image rugueuse de la Russie, et sceller le rapprochement russo-européen.

De l’atlantique à l’Oural, la "maison commune" sur les rails
Les certitudes gaulliennes sur une Russie partenaire naturelle de l’Europe ont commencé à s’imposer, tant le centre de gravité de l’Europe semble s’être (à nouveau) déplacé vers l’Est depuis 10 ans.

Mais si la France regarde depuis peu vers l’Oural plutôt que vers les Rocheuses, elle apparaît encore loin derrière d’autres acteurs européens, tel l’Allemagne et l’Italie, plus prompt à saisir les modifications des équilibres au sein du continent européen.

La France à contre-temps
En 2007, les accents droits-de-l’hommiste de la diplomatie française, conjugués à l’atlantisme patenté de Nicolas Sarkozy, avaient suffit à geler les relations du quai d’Orsay avec le Kremlin, et à laisser les fruits du rapprochement aux pays voisins.

Ainsi, au début des années 2000, le groupe allemand E.ON et Gazprom s’entendaient pour construire le gazoduc Nord Stream, destiné à approvisionner l’Europe du nord-ouest en gaz, tout en contournant les pays de transit par la Mer Baltique.

En 2007, ENI, la compagnie énergétique italienne, s’associait avec Gazprom pour construire South Stream, un autre gazoduc construit pour approvisionner l’Europe en gaz.

Enfin, en 2009, Siemens signifiait abruptement la fin de sa collaboration avec Areva, pour se tourner vers Atomenergoprom, l’équivalent russe d’Areva.

Enfin EDF vint…
Depuis un an, la France a procédé à son « aggiornamento » diplomatique. Au cœur de ce renouveau, l’année Franco-Russe, célébrée aussi bien à l’Hermitage qu’au Louvre. Ce pragmatisme, a eu l’avantage de replacer la France au centre de la compétition européenne.

2009 a marqué le retour des grands groupes français. En novembre, lors de la visite de Vladimir Poutine, EDF obtenait la signature d’un accord cadre, lui octroyant 10% dans le projet de gazoduc South Stream, et laissait envisager un partenariat avec Inter RAO UES, le plus important électricien russe. Début mars, la visite de Medvedev à Paris satisfaisait les appétits d’un autre leader énergétique tricolore, GDF Suez, en lui permettant d’acquérir 9% du projet Nord Stream.

La coopération nucléaire était également fortement encouragée. Stratégie soutenue par François Roussely, l'ancien président d'EDF, à qui Nicolas Sarkozy a confié une mission sur l'avenir de la filière nucléaire, EDF annonçait début mars un projet d’accord avec Rosatom.

Aux coté de l'énergie, la France a également renforcé ses liens économiques grâce à la vente probable de quatre vaisseaux BPC de type Mistral à la Russie. De même, des partenariats ont été créé entre Alstom avec Transmashholding (TMH), ou entre Renault avec Lada.

Une puissance régionale
Ce rapprochement en fanfare ne doit pourtant rien à une récente découverte d’Alla Pugacheva par Nicolas Sarkozy, mais bien à un calcul économico-politique. La France a renforcé sa collaboration avec la Russie, car le pays-continent possède de sérieux leviers économiques et géopolitiques en Eurasie.

En Europe, la Russie, principale fournisseuse d’énergie, n’en est pas moins un partenaire économique majeur. Actuellement troisième partenaire commercial de l’Union Européenne, le potentiel du marché russe, notamment en ce qui concerne les hautes technologies, suscite des intérêts extrêmement forts.

Sur la scène internationale, la Russie demeure un acteur incontournable, tant dans le dossier afghan, grâce à ses liens historiques avec l’Inde et l’Asie Centrale, que sur le dossier iranien, et sa collaboration au programme nucléaire. Enfin, trop souvent ignoré, les récentes vagues d’immigrés russes vers Israël ont procuré à la Russie un levier important sur la politique de ce pays.

Une fenêtre d’opportunité
La construction d’une relation solide entre les européens et la Russie doit s’opérer tout de suite, car une fenêtre d’opportunité s’est récemment ouverte.

Tout d’abord, la fin des turpitudes européennes autour du Traité de Lisbonne permet désormais aux dirigeants de regarder au de-là de leurs frontières. La Russie, qui ne demande qu’à être considéré, serait probablement flattée d’être enfin traitée comme un partenaire stratégique éssentiel, ce qu’elle est par ailleurs.

Surtout, les européens devraient profiter de l’espace laissé vacant par Barack Obama. Absorbé par sa réforme de la politique de santé et sur l’Afghanistan, le président américain a offert aux européens l’opportunité de proposer un partenariat à la Russie, incluant aussi bien les questions de sécurité européenne que de collaboration économique.

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