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jeudi 25 mars 2010

Politique énergétique chinoise : L’heure des choix

Dans son ascension économique foudroyante, la Chine s’appuie sur une consommation énergétique gigantesque. Aidée par de considérables ressources charbonnières, la Chine a jusque là pu fournir à son industrie une énergie bon marché et en quantité, tout en préservant son autonomie énergétique.

Pourtant, la faible efficacité énergétique de cette ressource, couplée à une augmentation sans cesse croissante de la demande de l’industrie et des ménages, devraient mettre à mal dans les années à venir les choix énergétiques hérités des années 1950.

La recherche de l’indépendance énergétique
L’origine de l’attachement de la Chine à son indépendance énergétique est à rechercher dans son enfance communiste. Fidèle aux principes du communisme soviétique, auxquels la Chine était encore attachée au début des années 1950, le premier plan quinquennal imposa l’industrie lourde au centre de l’économie, tout en prônant l’indépendance énergétique. Le charbon, dont la Chine dispose des troisièmes réserves mondiales, permit de réaliser les plans de développement économique de Pékin.

Au tournant des années 1970, la Chine s’intéressa un temps à l’exploration pétrolière. Mais le plafonnement rapide de sa production, ainsi que la crainte d’une présence étrangère dans un secteur stratégique, fit rapidement abandonner toute velléité de diversification.

Aujourd’hui, le Charbon compte encore pour 70% des approvisionnements en énergie primaire, dont 70% sont consommés par l’industrie, bien que les importations de pétrole augmentent de façon croissante.

Un élément clef du modèle économique chinois
La grande domination du charbon sur l’énergie chinoise s’explique par le choix d’un modèle économique tourné vers l'exportation.

Grâce à la compétitivité du charbon, renforcée par les barrières posées à l’entrée des marchés pétroliers et gaziers, l’industrie a bénéficié jusqu’ici d’une énergie bon marché, lui permettant de gagner en compétitivité sur les marchés internationaux.

Au total, 40% de l’énergie consommée en Chine est utilisée pour exporter. Cette corrélation entre charbon et exportations se vérifie d’ailleurs dans la proximité respective de leur taux de croissance, 10% pour l’économie entre 2000 et 2007, 9.7% pour le charbon sur la même période.

Un modèle devenu insoutenable
Dans une période où les médias égrainent au fil des jours les nouveaux secteurs où la Chine est devenue leader, une analyse à long terme des perspectives de croissance de l’économie chinoise rend pourtant ce modèle énergétique non viable.

Face à l’augmentation sans cesse croissante de la consommation énergétique, la production de charbon s’avérera insuffisante dans les années à venir. Cette évolution risque d’entraîner de profonds bouleversements, qui affecteront autant l’industrie que la société dans son ensemble.

Le pays devra avant tout être capable de mettre en place des mécanismes de marchés lui permettant de s’approvisionner sur les marchés mondiaux. A titre d’exemple, l’abandon de la politique de subvention et de quotas à l’énergie, devrait permettre au gaz de redevenir compétitif face au charbon.

La Chine devra également être capable d’apporter une réponse aux déséquilibres économiques et sociaux qu’une libéralisation des prix de l’énergie entraînera chez les entreprises et les ménages.

Une politique énergétique, miroir des défis chinois
Une telle évolution constitue un profond bouleversement pour un pays qui a construit sa politique énergétique sur la double logique de l’ouverture et de l’autosuffisance énergétique. De manière plus large, l’abandon de la sacro-sainte autonomie énergétique obligera Pékin a assumer les responsabilités d’une puissance majeure sur la scène internationale. Ce n’est qu’à ce titre que la Chine pourra se hisser au rang de grande puissance.

A titre d’exemple, en freinant l’ouverture du marché du gaz, la Chine continue de sécuriser ses approvisionnements énergétiques. Pourtant, cette politique ralentit les transferts de technologies que des investissements étrangers apporteraient, et paradoxalement, accroît la vulnérabilité de son économie en ne permettant pas de réduire l’intensité énergétique de son industrie.

Sur un autre échelle, l’inflexibilité chinoise à Copenhague, ou sur le dossier iranien, protège son modèle économique énergétivore, mais hypothèque ses chances de voir les positions américaines ou européennes s’adoucir sur d’autres dossiers, comme Taiwan ou le Tibet.

La question énergétique chinoise pointe ainsi du doigt une question essentielle : La Chine sera t’elle capable d’adapter ses politiques aux exigences qui incombent à une grande puissance en devenir ?

La réponse sera partiellement donnée lorsque la Chine aura mis en place un mix énergétique durable. A ce titre, les récents investissements de la Chine dans le nucléaire et dans l’énergie éolienne pourraient prolonger cette période de relative autonomie énergétique, et repousser ainsi l’inflexion de la politique chinoise sur la scène internationale.

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